Le crépuscule des idoles, épisode 2, par le Docteur Danche

Alors? La même? Pas la même?

Avec ces photos italiennes, je tenais un scoop potentiel formidable pour www.nuancierDS.fr avec cette bagnole à Turin, mais je me perdais en conjectures en les examinant. Il y avait des différences notables avec l'original, tout de même. Mais pourtant, qui aurait sacrifié un modèle de cette époque pour faire une copie récente?!

Malgré mes réticences, il me fallait joindre en urgence le Professeur Petriman. Son téléphone semblant en dérangement, je décidai de me déplacer dans son antre.

En arrivant je compris pourquoi il n'avait pas décroché: le Professeur me salua sans même se retourner, il était en train de nourrir un rare possion exotique dans son aquarium à bulles. Vous l'ai-je dit? Le professeur est aquariophile, et le moment du repas de ses protégés dure plusieurs heures. Discuter avec lui dans ces moments-là est une véritable épreuve de Koh-Lanta.

Je pris mon courage à deux mains et, sans tergiverser, je lançai deux photos sur une table basse.


 


"- Professeur, regardez ces clichés. Pensez-vous que la DS de la triennale aurait survécu?"

Un coup d'oeil lui suffit à embrasser les photos.
"- Ah oui celle de droite, c'est celle de Turin".

"- Vous la connaissiez, Professeur??"

Mon scoop s'effondrait lamentablement.

"Oui. 19; 20; 21"

Je crus que c'étaient là des indices pour m'aiguiller, mais non, je me rendis vite compte qu'il comptait des graines multicolores pour sa poiscaille. J'insistai.

"et alors? C'est la même que celle de 57?"

"La même? ...tiens..tiens..mmmm. ..c'est bon, hein...." L'homme parlait à ses poissons tout en leur donnant ces satanées graines. Mon dos était moite de sueur, je n'allais pas m'en sortir. Quand j'eus l'illumination.

"Il ont de la chance d'être dans l'eau, vos poissons. Car il fait soif, non?"

Bingo. 30 secondes plus tard, Petriman me révélait le pot aux roses autour d'un double cognac.

 


"Oh ben c'est tout bête, vous savez, Danche.".

Il chercha des documents qui étaient percés et rangés dans un classeur d'apparence médiévale.

"Lisez donc cet entrefilet, ça date de 1960, c'était à l'ouverture du musée automobile de Turin. Lisez bien, vous voyez bien le mot "comme". Il est écrit: "Comme à la Triennale". On ne dit pas que c'est celle de 1957, on dit que c'est "comme" celle de 57: c'est juste une évocation, vous voyez."


Oui. Si c'était juste une évocation, ça expliquait que le dessous du châssis soit différent (non strié), que le pied soit bien plus court, ça expliquait les ailes longues, le changement de cornet de clignotant, l'absence de catadioptre type DS, le volant noir. Ca expliquait tout: c'était juste une évocation faite en 1960 de l'objet qui avait frappé les esprits italiens par son design trois ans plus tôt, et qui était reparti en France vers un destin incertain.

Une photo accompagnait l'entrefilet de Petriman. Aucun doute, c'est la même voiture que l'on peut encore voir aujourd'hui à Turin, inchangée, si ce n'est le support, qui semble avoir été considérablement renforcé, perdant ainsi en légèreté.

...je suppose que le support a été changé au moment où elle a été installée dans cette nouvelle pièce à miroirs.

Au moins ça prouve bien que la voiture de Milan est de 1960, et pas un truc bricolé récemment. C'est mieux que rien. Mais je suis déçu.

 

Additif: j'ai, bien plus tard, reçu ce petit message de confirmation de Maurizio, qui s'occupe du conservatoire Citroën en Italie.

"Nous avons parlé à Camillo Saini, l'ingenieur chef de Citroën Italie et realisateur de le support et de le carenage original de la DS de la Triennale en 1957. Il dit nous:

que les DS exposée à Milan et Turin ne sont pas la meme voiture. L'orginal est une coque vide, sans suspension et sans direction arrivée de Paris avec des ailes avant speciales, sans les trous pour le clignotant avant (le memes des prototypes de la Cabriolet Usine?)

que la voiture exposée à Turin a les memes ailes avant mais pas de carenage et un novueau support que n'est pas le meme de 1959 (realisée aussi par Citroën Italie). La voiture exposée à Turin a une boite de direction et les support de bras de suspension avant. Elle aussi est arrivée de la France en 1959 et probablement est la meme exposée en Hollande. "

 

Lire la suite: le totem deuxième nez.