<Tribune Libre>

Le break transgenre, par Laurent G

Dans le milieu de la DS, il est récurrent, à travers les réseaux sociaux, forums ou autres rassemblements de voitures anciennes, de voir ou d’entendre certaines questions posées par une personne qui s’intéresse : « quelle est la différence entre une ID et une DS ? » et également « le break, c’est une ID ou bien une DS ? » 
La réponse à la première question s’apparentant fortement à la résolution d’un système d’équations à plusieurs inconnues, du genre plutôt indigeste, je me suis penché sur la seconde en m’efforçant cependant de simplifier les paramètres au maximum…
Le break est-il une ID ??  Evidemment la réponse ne coule pas de source, sinon la question ne se poserait pas ! Mais chez Citroën à cette époque, rien n’est jamais simple…

La DS a fait, comme chacun sait, son entrée au salon d’octobre 1955. Si la première ID 19 est présentée en octobre 1956, et commercialisée un peu plus tard, le break attendra octobre 1958 pour apparaitre et encore quelques longs mois avant de parcourir nos routes.
A ce moment, tout est relativement clair, le break est entièrement dérivé de l’ID 19, aussi bien côté motorisation, que tableau de bord et présentation, en deux versions luxe ou confort comme pour l’ID. Rien à voir avec une DS et d’ailleurs le constructeur la nomme sans ambiguïté ID 19 (F, FA, FB, FC selon qu’elle soit Familiale, Ambulance, Break ou Commerciale).
Alors pourquoi se pose-t-on la question de l’appartenance ou non au corps des DS ? Dès cette époque, un gène assez dominant apparait : le freinage. Celui de l’ID 19 étant alors simplement actionné par un maitre-cylindre classique (aucune assistance), le constructeur jugea certainement indispensable d’accompagner ce break, qui peut être lourdement chargé, d’un freinage de type DS. Celui-ci utilise la pression du circuit hydraulique pour réduire les efforts à la pédale, et permet peut-être aussi de répartir de façon optimisée la force de freinage entre l’avant et l’arrière selon la charge. Le break est en effet muni du fameux champignon, que ne possèdera jamais l’ID… Cette pédale champignon est d’ailleurs l’élément apparent qui différencie à coup sûr, quelle que soit l’époque considérée, une ID berline d’une DS berline !


Mars 1963, léger glissement du break vers une définition DS, en recevant le moteur 83ch de celle-ci. La berline ID 19, elle, reste sur les réglages du moteur de base, soit une dizaine de chevaux en moins selon les années, jusqu’au modèle de l’année 1966.
Année 1966 justement, une étape dans la carrière des modèles D, avec l’apparition (entre autres) du nouveau moteur 5 paliers, en 11cv (DS 19) ou 12cv (DS 21) pour la DS… mais également pour le break. L’ID 21* aura donc bien existé, sous la forme d’un break ! L’ID berline se contentera pendant encore un an de l’ancien moteur à 3 paliers.

1968, un pas de plus du break vers la configuration DS… Il est possible, sur demande, d’obtenir la fameuse boite de vitesse à commande hydraulique (BVH). On comprend bien alors, qu’un break 21 BVH se rapproche dangereusement d’une véritable DS, n’étant plus différenciée que par l’aspect d’une partie de la planche de bord côté passager, et de quelques éléments de présentation dont, pour la France, les petits enjoliveurs de roue qu’il conservera jusqu’au bout.

Pour l’année modèle 1970, uniformisation des tableaux de bord pour toute la gamme ID et DS. Cet élément est encore un facteur de rapprochement entre le break et la famille DS. Pour 1971, il n’est d’ailleurs plus question d’ID 20 F ou ID 21 F, mais de break 20 ou 21. Fini l’ID break ! L’officialisation aux yeux de tous aura lieu pour 1973, avec la présence d’un logo qui apparait sur la face arrière, levant ainsi toute ambiguïté : DS 20 ou DS 23. D’ailleurs, seuls le break et la DS ont pu profiter du gros moteur 2347cc dit « 23 ».
Parti d’une simple ID19 (type mines ID19 F), le break est progressivement arrivé DS 23 (type mines DS série FF). Cependant, outre les quelques enjoliveurs manquants, le break n’aura jamais non plus connu l’injection électronique, ni la présentation Pallas… Alors ce break finalement, une ID ou une DS ? Allez donc répondre en quelques mots à cette question au badaud qui découvre le milieu de la « DS » sur un rassemblement de voitures anciennes…
LaurentG

*J’ai le très ancien souvenir d’une discussion animée sur l’existence ou non d’une version ID 21 avec mon instituteur de CP pendant la classe, en 1969. Un passionné qui roulait d’ailleurs en DS19 Pallas…